Lefaucheux 1858 N

L’arme présentée ici est un Revolver de Marine (Ancre au culot) sortie des ateliers de St Etienne (S) en 1869.

Il me semble que l’arme a subi la transformation en "N", à savoir des crochets à la place de certaines vis et deux autres modifications (voir ci-dessous).

Arme à culot rond, sans repose doigt, dont la fabrication sera par la suite (1868-1870) avec un culot en diamant et pontet avec repose doigt.

Sur le canon, un "rail guide" ou "canal" de baguette, permettant de protéger cette dernière contre le faussement. Défaut constaté dés 1861 mais qui ne sera résolu qu’à partir de Juillet 1867.

Le numéro 239 est probablement le numérotage de bord.

Plus de 6000 revolver de Marine 1858 (les autres corps de l’armée Française n’accepteront jamais le modèle 1858 ni le modèle à percussion, appelé communément "le modèle 1870") avec ou sans modifications, sortiront de la Manufacture de St Etienne de 1858 à 1870 suivis du modèle 70 pour être remplacés par le modèle 73.

XXX

 

Ci-dessous les différentes étapes qui ont mené à la fabrication de l’arme présentée ici

 

Lefaucheux de Marine, modèle 1858 "N"

L’état Français décide enfin d’adopter le revolver Lefaucheux, après plusieurs années d’essais, lors de la séance du Conseil de l’Amirauté du 27 octobre 1857, avec une parution au "Bulletin Officiel de la Marine 1859 N° 7" le 4 Mars 1859.

Entre temps, le 23 Avril 1858, l’Etat dicta à Eugène Lefaucheux les conditions de cession du droit de fabrication par les Manufactures des dits "Pistolets Revolvers" afin d’y faire apporter  les modifications de détail qu’il reconnaîtrait utiles à son service.

 

 

Vincennes 3DD4/344

Ministère de la Marine et des Colonies

Paris le 19 mai 1858

            ______________

Direction du Matériel

            ______________

Bureau de l’Artillerie

                                               Rapport au Ministre

Conformément à la décision du Ministre du 23 avril dernier, la commission des marchés spéciaux à l’artillerie a fait connaître à Mr Lefaucheux à quelles conditions on pourrait traiter avec lui, pour la cession du droit de faire fabriquer, dans les manufactures de l’état les pistolets revolvers du système pour lequel il est breveté : ces conditions étaient les suivantes :

1° paiement d’une prime de 15 Frs. par pistolet jusqu'à concurrence de 1500 à fabriquer cette année.

2° réduction de cette prime à 10Frs. pour les 1500 suivants et à 5 Frs. pour tous ceux qui seraient faits au-delà des 3000.

3°faculté pour la Marine de faire apporter aux pistolets revolvers les modifications de détail qu’elle reconnaîtrait utiles à son service.

Mr Lefaucheux a donné son adhésion sans restriction à ces conditions et il a souscrit, en conséquence, un traité qui a été accepté par la commission des marchés spéciaux à l’artillerie.

J’ai l’honneur de soumettre à l’approbation du Ministre les expéditions de ce traité.

Le directeur du Matériel.

 

 

Vincennes Marine

3DD4/337

Paris le 19 Mai 1858

 

Monsieur Lefaucheux, 9 rue Lafayette à Paris

Monsieur, j’ai approuvé le traité que vous avez souscrit le 8 de ce mois et par lequel vous cédez à la Marine le droit de faire fabriquer dans les manufactures d’armes de l’état des pistolets revolvers du système qui fait l’objet de votre brevet du 15 avril 1854.

Vous trouverez ci-joint les deux expéditions de ces traités revêtus de ma signature.

Veuillez les faire enregistrer et m’adresser ensuite l’une d’elles avec les 20 exemplaires mentionnés à l’article 10.

Signature ( ?)

Dés le 21 mai 1858 le Ministère de la Marine commande à la Manufacture de St Etienne les premiers 1500 revolvers qui sortiront des ateliers fin 1858, début 1859.

Dés le 29 mars 1859, le Ministère de la guerre lance une concertation afin d’apporter une première série d’améliorations.

Dans un rapport du 7 février 1861 une constatation évidente est faite concernant les baguettes :

 

 

« Messieurs, il résulte des rapports trimestriels qui m’ont déjà été adressés en vertu de la circulaire du 8 octobre insérée au bulletin officiel, que bien que l’emploi des pistolets revolvers à bord des bâtiments y soit considéré comme un progrès réel, ces armes délicates en plusieurs de leurs parties, sont sujettes à se détériorer promptement soit par la maladresse de quelques hommes, soit par les chocs qu’elles reçoivent dans les branle-bas de combat.

Je ne saurais trop appeler l’attention des commandants de bâtiments sur cette dernière cause de dégradations, qui d’après le rapport même d’un capitaine de vaisseau, se produit dans des inconstances auxquelles aucune arme portative ne saurait résister, puisqu’il est spécifié que des pistolets revolvers ont eu leur baguette faussée parce que dans la précipitation des branle-bas, ils étaient foulés aux pieds par les marins. »

 

Mais qui ne donnera lieu à une modification que plusieurs années plus tard.

La naissance du Modèle "N" se trouve dans le rapport du 7 décembre 1861.

 

 

 Vincennes Marine

3DD4/354

Paris le 7 Décembre 1861

 

Mr le Ministre de la guerre à Paris

Mr le Ministre et Cher Collègue, il résulte des rapports faits par divers bâtiments de guerre et de l’étude qui a été faite à l’inspection d’artillerie de la Marine qui font usage des pistolets revolvers, que les armes sont susceptibles de simplification et d’amélioration dans quelques unes de leurs parties, à savoir :

1° Suppression de quatre vis sur sept qui relient la garniture de crosse et remplacement de ces vis par des crochets qui facilitent le démontage.

2° Allongement du ressort de mentonnet qui est en même temps renforcé ainsi que la vis qui le force.

3° Modification de l’arrêt du cylindre qui a été établi sur le corps du chien.

4° Substitution de l’acier au fer dans la construction des baguettes, sujettes aujourd’hui à se fausser.

Le modèle joint reproduit les 3 premières modifications.

Je prie V.E. ( ?) de vouloir bien transmettre les instructions nécessaires et le modèle au Directeur de la Manufacture de St Etienne pour que les changements indiqués soient apportés, s’il en est temps encore, aux pistolets revolvers aujourd’hui en cours de confection dans cette manufacture d’armes.

S’il n’était plus possible de la faire sur la partie des 1000 pistolets commandés, je serais désireux d’être fixé sur ce point afin de faire une commande supplémentaire.

 

 

Et afin de les "distinguer" des autres il est décidé le 17 octobre 1863 de marquer, ceux qui auront subi les modifications d’un "N".

 

 

Vincennes Marine

3DD4/364

Paris le 17 octobre 1863

Mr le Directeur de la Manufacture d’armes de St Etienne.

Monsieur, les 1500 pistolets revolvers qui ont été commandés cette année à la Manufacture de St Etienne pour le compte de mon Département doivent recevoir les modifications indiquées dans une dépêche adressée le 7 décembre 1861 à son Excellence le Ministre de la Guerre.

Afin de distinguer ces pistolets de ceux qui ont été fabriqués antérieurement, je désire qu’ils soient marqués d’un N (neuf) de 4 mm de hauteur.

Cette marque devra être apposée sur la culasse, du côté opposé à l’inscription qui indique la provenance.

Je vous prie de prendre des dispositions dans ce but et de faire diriger sur Paris à mon adresse, cinq pistolets de l’espèce qui seront pris sur les 200 destinés au port de Cherbourg.

Vous voudrez bien faire expédier à Lorient les premiers pistolets dont vous pouvez disposer

Recevez….

Le Ministre

 

 

La résolution du faussement de la baguette d’éjection n’est abordé que plusieurs années après les premières constatations.

Le problème est pris au sérieux dans le rapport du Colonel Sapia du 26 mai 1866 relaté durant la séance du Comité de l’Artillerie Marine du 11 juillet 1866.

 

 

« …………

§ 1 Objet du rapport : Faussements  des baguettes de revolver. Défauts de dispositif actuel.

Par ordre Ministériel en date du 26 mai 1866, le Comité consultatif d’Artillerie de la Marine et des colonies a été invité à donner son avis sur la convenance d’appliquer au Pistolet revolver de la Marine (système Lefaucheux modifié), une disposition destinée à prévenir le faussement de la baguette, accident qui se reproduit fréquemment dans l’emploi que l’on fait de cette arme à bord des bâtiments de la flotte.

…………….

……………..Si l’ont jette un coup d’œil sur le dispositif de la baguette, on la voit complètement isolée de l’arme sur les deux premiers tiers de sa longueur et simplement engagée par son dernier tiers dans le renfort qui porte le canon. Comme dans les 2 premiers tiers, elle est séparée du canon par un centimètre de vide, on conçoit qu’il suffise, ayant saisi l’arme par le canon, d’exercer, sans en avoir bien conscience, une pression médiocre sur la baguette, pour la fausser immanquablement à la mortaise du petit ressort qui la maintient en saillie au-dessus du renfort.

Ajoutons que cette disposition isolée et saillante de la baguette peut devenir, dans un maniement précipité, une cause d’accrochement fâcheux et dangereux.

 § 2 Proposition de Mr Dechambre, Garde principal d’Artillerie

Le défaut évident de cette disposition et les graves inconvénients qu’elle entraîne n’ont point paru irrémédiables à Mr Dechambre, Garde principal d’Artillerie à la Marine (section du contrôle des armes). Cet estimable employé militaire, auquel la Marine est déjà redevable de plusieurs perfectionnements de détail dans la construction de ce même pistolet revolver, a imaginé de remplir l’intervalle qui sépare le canon de la baguette, par un appendice en fer ou en fonte malléable, soudé sur le canon et présentant, du côté de la baguette, une rainure longitudinale dans laquelle celle-ci se trouve encastrée à mi-corps.

……………….

 § 6 Résumé et conclusions – Avis du Comité.

Suite donnée par le Ministre à cet avis : "La proposition de Mr Dechambre sera soumise à de nouvelles expériences à bord des bâtiments de l’escadre".

(Lettre du 1er septembre 1866, du Ministre au Président du Comité ; et procès verbal de la séance du 18 octobre 1866 tome V, page 66).

Pour tous ces motifs, le Comité d’Artillerie, à l’unanimité de ses membres présents, donne son assentiment le plus complet à la disposition très simple imaginée par Mr Dechambre pour soustraire les baguettes des revolvers aux chances de faussement pouvant résulter des circonstances ordinaires du service à bord ; et il émet le vœu que cette disposition soit appliquée en Manufacture, aux armes neuves de l’espèce et dans nos Directions des Ports, aux armes actuellement existantes au fur et à mesure de leur rentrée en magasin.

Le Colonel d’Artillerie

Membre secrétaire du Comité

Sapia Cte de Lencia.

 

Le Général de Division

Président du Comité

 

Signature ( ?) »

 

 

Modification qui deviendra réglementaire le 19 Août 1867, par ordre du Ministre et qui de suite fait la commande de 4689 supports de baguettes.

 

 

Marine Vincennes

3DD4/384

 

Paris le 19 Août 1867

Monsieur le Général de Division, Président du Comité d’Artillerie de la Marine à Paris

Général, j’ai l’honneur de vous informer que, conformément à l’avis émis par le Comité de l’Artillerie que vous présidez, dans sa délibération du 13 juillet dernier, j’ai rendu réglementaire le support de la baguette, proposé par le Garde principal d’Artillerie Dechambre en vue de prévenir le faussement de la baguette des pistolets revolvers pendant le service à bords des bâtiments.

Ce dispositif sera appliqué à tous les pistolets revolvers que possède la Marine aussitôt que les Ports auront reçu les supports qui vont être commandés à l’industrie.

Le Ministre.

 

 

Marine Vincennes

3DD4/384

 

Paris le 19 Août 1867

Monsieur le Président de la Commission des Marchés spéciaux à l’Artillerie à Paris

Général, j’ai l’honneur de vous prier de faire acheter par la Commission des Marchés Spéciaux à l’Artillerie , que vous présidez, 4689 supports de baguette pour pistolets revolvers en usage dans la Marine.

Ces supports seront en fer étiré d’une longueur de 83 mm et conformes au tracé ci-joint. Ils seront répartis dans les Ports de la manière suivante :

            Toulon                        1638

            Brest                           1036

            Lorient                          813

            Rochefort                      652

            Cherbourg                    550

Le Ministre.

 

LEFAUCHEUX Novembre 2010

Une firme française fabrique le nécessaire pour recharger ce type de munition

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